Lettre à l'entourage du malade alcoolique

 Cette lettre est destinée à l’entourage des malades alcooliques 

Lettre à la famille 


Agacement, tristesse, agressivité, faux-espoirs, indifférence… et toutes les pensées négatives qui vont avec sont autant de sentiments qu’éprouve l’entourage des malades alcooliques.

 Depuis quelques jours, la personne malade est hospitalisée et vous êtes seul(e). Profitez-en pour penser à vous, vous retrouver dans le calme, reprendre une vie plus normale et puis aussi pour essayer de comprendre ce qu’il se passe et envisager l’avenir. 

Evidemment chacun est un cas particulier, mais il y a des constantes dans le comportement des alcooliques et vous avez tous traversé à peu près les mêmes épreuves. Comment en est-on arrivé là ? 

C’est peu à peu que s’installe l’alcoolisme et que s’installent parallèlement les comportements que vous avez mis en place pour ne pas voir dans un premier temps, ignorer ensuite et enfin combattre. 

De ce combat inégal vous ressortez épuisés, éprouvés, peut-être furieux en tout cas tristes et désemparés. Il faut maintenant faire le point, reprendre votre vie en main, préparer l’avenir, quel qu’il soit. 

Déjà, si vous prenez la peine de lire cette lettre, c’est que, à tout le moins, vous avez envie de comprendre et d’agir pour que la situation s’améliore. Tenter de comprendre. L’alcoolisme est une maladie, grave, mortelle même, que l’on ne sait pas encore guérir. 

Contrairement à certaines autres maladies, elle est complexe, multifactorielle, elle prend racine à la fois dans le corps et dans l’esprit On peut essayer de la stabiliser, on peut donner au malade des moyens de lutter et d’éviter les rechutes, mais pour le reste de sa vie, la personne malade devra être abstinente et vigilante. 

Ce n’est pas facile, votre soutien est nécessaire mais, si il/elle y arrive, il/elle méritera toute votre admiration ! Bien sûr on ne devient pas alcoolique en ne buvant que de l’eau. Il y a naturellement des comportements à risque, mais tous les gros buveurs ne deviennent pas alcooliques. C’est une évolution, c’est un changement de nature, c’est une maladie à la fois physiologique et psychologique qui demande donc un double traitement. 


Pendant l’hospitalisation, le sevrage physique se fera sans difficulté majeure et sans souffrance. Mais ce n’est que la première étape. Le sevrage psychologique est beaucoup plus lent et difficile. A la clinique un long travail va être amorcé avec le médecin traitant, au sein des réunions de psychoéducation et dans les groupes de parole. 

Cette démarche se fait sans vous, on ne peut être le conjoint et le thérapeute. Mais vous pouvez vous y intéresser et le suivre. Ce qui est important c’est l’avenir : que va-t-il se passer ? Dans quel état le (la) malade va être en sortant ? Que faut-il faire ou ne pas faire ? Que penser ? Qu’espérer ? 

A toutes ces questions il est difficile de répondre mais il y a quand même quelques point clés à prendre en compte. Tout d’abord rétablir le dialogue avec la personne malade et faire de nouveau confiance. Cela peut être vraiment difficile après tant de mensonges et de promesses non tenues. 

A ce propos, il faut savoir que presque tous les malades alcooliques se livrent au mensonge et à la manipulation quand ils sont sous l’emprise de l’alcool. Ce n’est pas qu’ils ont changé de caractère mais ils sont tellement malheureux d’avoir bu, ils culpabilisent tellement qu’ils trouvent plus facile de mentir et de faire porter la responsabilité sur les autres plutôt que de regarder en face la réalité de leur maladie. 

Le mensonge et la manipulation sont plus des manifestations de mal-être et de difficultés que de méchanceté ou de perversité. Ce premier pas vers un dialogue clair et sincère est essentiel. Vous ne pourrez rien reconstruire si vous continuez dans la demi-vérité, le non-dit, le silence, la rancœur ou la colère. 


Seconde étape : tout faire pour rendre sa dignité au malade alcoolique et ne pas avoir de comportements infantilisants. En clair cela veut dire faire confiance là aussi, par exemple : - ne pas cacher les bouteilles d’alcool : vous le savez bien, rien n’est plus facile que de s’en procurer - ne pas avoir de lourds regards soupçonneux - ne pas surveiller ou du moins ne pas en avoir l’air. 

Vous savez bien que cela ne sert à rien et vous vous reprocherez ensuite votre attitude, tout cela n’est pas sain, laissez le(la) donc se débrouiller tout seul, c’est plus clair et moins culpabilisant pour tout le monde. Enfin, au fur et à mesure que le malade alcoolique va se stabiliser, il vous faudra aussi vous adapter à ce nouvel équilibre. 


L’alcool a créé dans votre famille un grand désordre auquel tout le monde s’est plus ou moins adapté. Si l’alcool disparaît, le rôle du malade au sein de la famille va changer, il faudra de nouveau ajuster les conduites des uns et des autres, c’est également difficile. Les comportements peuvent changer ainsi que les centres d’intérêt 

Mais il faut aussi penser à vous et vivre votre vie de la façon la plus équilibrée possible, en poursuivant les activités qui vous intéressent vous, qui vous apportent un équilibre. Il n’y a pas lieu de « se sacrifier » ou d’abandonner ce qui vous fait plaisir. Revoyez des amis et, si vous aviez renoncé à certaines activités pour être plus présent(e), reprenez les. Dites vous bien que vous n’êtes ni le médecin, ni le thérapeute, ni l’infirmier, vous avez votre vie à vivre aussi et mieux vous la vivrez, mieux ce sera pour tout le monde. 

Ce n’est pas facile. Peut-être n’avez-vous plus envie de faire des efforts ? Peut-être pensez-vous que vous en avez déjà fait beaucoup, ce qui est d’ailleurs parfaitement vrai. Vous souhaitez que l’on prenne aussi en considération votre souffrance, vos difficultés, rien n’est plus légitime. 

Bien sûr vous savez que les paroles ou les gestes agressifs ou insultants étaient prononcés sous l’effet de l’alcool, mais, c’est vrai aussi, cela laisse des traces qui, parfois, ont du mal à s’effacer. Mais c’est à vous de décider de la direction que vous voulez donner à votre avenir. Le point important est de ne pas vous sentir isolé et seul, éventuellement un peu honteux. 

Beaucoup de personnes partagent vos difficultés et sont prêtes à vous aider. 

Faites-vous confiance !

Source : http://www.mnaudet-psy.com/wp-content/uploads/2015/04/Lettre-%C3%A0-la-famille-des-patients-alcooliques.pdf 


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